critique La colline a des yeux, sortie le 21 juin

Publié le par Matthieu Deprieck

La Colline a des yeux et des tripes.

Un de plus. Le réalisateur français Alexandre Aja a sauté le pas et suivi tous ces jeunes auteurs qui s’installent à Hollywood pour signer des remakes de chefs d’œuvres du cinéma d’épouvante. Comme Zack Snyder et L’Armée Des Morts (déclinaison du Zombies de Romero) ou Marcus Nispel et Massacre A La Tronçonneuse, Alexandre Aja s’essaye à l’exercice avec, c’est assez rare pour être souligné, une grande maîtrise. Car Alexandre Aja est d’abord un metteur en scène, auteur du remarqué Haute Tension.

La Colline a des yeux n’est pas qu’un vulgaire clip. La photographie, glauque et ensoleillée (Aja prouve que les deux sont conciliables et que l’horreur ne naît pas que dans l’obscurité), s’affiche dès les premières secondes et soutient un final haletant et sanglant. Car La Colline a des yeux a aussi des tripes. Et malgré les efforts de la censure pour proposer l’objet le plus proche du tout public, le film reste brut, énergique, presque sauvage. A la différence de tous les récents films d’horreur, la violence n’est ici pas gratuite. Elle vient punir une famille de ploucs du Middle west, parti en vacances dans un camping-car en plein Arizona. Ce désert se situe au croisement d’un far west figé dans un ancien temps et d’un no man’s land apocalyptique détruit par d’anciennes expériences nucléaires. Comme chez Wes Craven, Alexandre Aja reprend les critiques contre une civilisation qui ignore ses contemporains, qui les broie pour avancer à grandes enjambées vers un avenir moderne mais incertain. Toute la distribution du film illustre ces personnages ratés nés d’une société américaine à deux vitesses : un patriarche flic qui conserve tant bien que mal son autorité sur le cocon familial, un vendeur de téléphones portables presque tyrannisé par sa femme, une fille trouillarde et peste.

La Colline A Des Yeux n’est pas qu’un tour de manège visant à simplement terroriser le spectateur. Le film montre que la vie, que l’accès à l’âge adulte passe par une élimination de ses parents. Théorie un peu brutale mais qui prend tout son sens quand le vendeur de portables se retrouve chef de famille, à mille lieues de la posture qu’il occupait dans la première demi-heure. Pour installer ces personnages, Alexandre Aja n’hésite pas à avancer lentement, à montrer plusieurs dizaines de minutes sans qu’aucune goutte de sang ne soit versée. Les personnages prennent le temps de s’installer, de se présenter aux spectateurs. Et tant pis pour les frustrés du gore qui rongeront leur frein dans l’attente d’un bras coupé, d’une lacération sauvage ou d’un jet d’hémoglobine. La construction du film permet également aux acteurs de se montrer et de ne pas être que des futurs cadavres.

Au générique, les fans de la série télévisée Lost reconnaîtront Emilie de Ravin, la jeune maman Claire sur l’île déserte. Preuve que La Colline a des yeux n’est pas qu’un défouloir, Alexandre Aja varie les plans, la vitesse d’exécution, joue avec la mise en scène. Derrière les séquences de massacre, quelques plans contemplatifs du désert viennent rappeler que l’horreur naît du silence avant d’y retourner.

Publié dans Critiques cinéma

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